Gastronomie londonienne, un concept d’avance ?

CONCEPT. Du bar à champagne où le Hot Dog et ses déclinaisons viennent accompagner un des différents crus à bulle proposés au menu chez Bubbledogs, du nouveau restaurant au 37e étage en plein cœur de la City mêlant couleurs pop, tags sur les murs et hommage à la Sushi Samba génération du Sud du Brésil, en passant par The Waffle Project où la gastronomie et œuvres d’art ne font plus qu’un, la capitale anglaise sort une nouvelle fois de plus des lignes conventionnelles.

À l’image de cette impertinence qui donna naissance au punk et à la mode si chers à Vivianne Westwood, l’Angleterre choisit le terrain culinaire pour affirmer sa différence – et apposer sa marque de fabrique ? – dans un monde encore trop souvent imbriqué dans des règles parfois pesantes.

Ou alors est ce le contraire qu’il faille étudier ? N’est-ce pas plutôt cette liberté d’esprit que ces restaurateurs viennent chercher ? Que ce soit dans le quartier de Chiswisk, comme Hedone, le tout récemment (et avant l’heure suite à des fuites) étoilé au Michelin, tenu par un ancien blogueur ou au cœur de la City à deux pas du quartier de Shoreditch, sur lequel personne n’aurait parié il y a encore quelques années.

Et à chaque rencontre, la même histoire, la même rengaine : “ça ne marcherait jamais en France“. A croire qu’ils se sont tous donnés le mot …  Alors on cherche plus loin, on creuse pour comprendre pourquoi ces ‘concepts’, ces idées qui sortent des conventions ne semblent pas promis à un avenir… probant.

Ont-ils voyagé ? Pris conscience d’une ouverture d’esprit comme on peut le voir à New York ? Oui. Et la plupart qui l’assument sont…français comme l’explique Romain Pottier, General Manager chez Sushi Samba.

Londres a toujours fait preuve d’une plus grande ouverture d’esprit,  moins tournée vers la critique. La différence est mieux acceptée dans le monde culinaire. Par exemple, j’ai travaillé il y a quelques années pour une chaine de restaurant basée à Miami, Asia de Cuba. On a eu le choix d’ouvrir à Paris mais on nous a mis tellement de bâtons dans les roues que nous n’avons pas donné suite, parce qu’on ne correspondait pas aux critères de la restauration en France. A l’inverse,  des endroits comme New York, Las Vegas, Hong Kong, Dubaï sont friands de ce type de concepts qui proposent quelque chose de différent jusque dans l’assiette. Je pense que Paris sera prêt dans les cinq années à venir.

Clamer que Londres offre un espace d’expression culinaire plus intéressant que sa voisine française peut paraître une aberration mais les faits sont là. Une fois passé le stade du cliché aux couleurs vert fluo et aux saveurs de Fish & Chips, Londres a son mot à dire…et pas des moindres.

Pour Paulo de Torso, Maître D’ à Bar Boulud, Londres est d’ailleurs devenu un passage obligatoire pour tous les restaurants qui cherchent une reconnaissance sur le plan international.

Elle fait partie des incontournables lorsque l’on veut assoir son nom à l’international. Tous les chefs l’ont compris et c’est pour cela qu’on les retrouve ici. Même des restaurants péruviens viennent s’implanter ici. Le dynamisme est vraiment différent d’ailleurs.

Même son de cloche chez Bruno Loubet, originaire de Bordeaux mais qui a longtemps voyagé entre Londres et l’Australie.

On ressent une atmosphère que l’on trouve nulle part ailleurs. Que ce soit à Sydney ou à Paris, c’est différent. Certes, le niveau, la technique sont élevés mais on n’arrive pas à retrouver ce même état d’esprit rempli d’énergie avec l’idée de faire bouger les choses et de créer une dynamique vraiment passionnante.

L’histoire se répète au moment de prendre un café. Un chauvinisme certain et nos habitudes d’un noisette vite consommé au coin d’un bar nous poussent à défendre la légitimité du café français. Et avec raison. Mais c’est sans compter sur les néozélandais ou les australiens qui ont ouvert à Londres des endroits spécialisés sur le sujet tels que Kaffeine ou Monmouth Coffee qui ont apporté un nouveau souffle au café. Comme les chocolatiers travaillant la fève depuis son origine on peut le faire.

Alors Paris s’y met peu à peu avec les ouvertures successives de Kooka Boora, Coutume et les tous derniers Lomi  et Téléscope qui valent le déplacement au cœur du 18e et du 1er pour un café de qualité travaillé sur place.

Même Time Out n’hésite pas à parler de ces ‘concepts un peu fous venus des U.S.’ pour décrire Le Glass, le nouveau bar qui a ouvert près de Pigalle, proposant des bières et des cocktails à la pression… le tout accompagné de… hot-dogs. Tiens, tiens.

A quelques jours de l’ouverture d’une table d’hôte d’un nouveau genre intitulée Table Ronde où les chefs viendront cuisiner sous les yeux (ébahis) d’une tablée en demi-cercle de 16 couverts, comme a pu le faire Nuno Mendes dans son Loft à Londres, Paris semble de plus en plus prêt à s’ouvrir à d’autres manière de vivre la gastronomie.

Et l’arrivée massive de Food Trucks ou  ou encore la belle initiative menée par Le Bureau d’Etude Gastronomique et son RestauMobile dans le cadre de Tous au Restaurant sont des signes prometteurs…

A suivre…

Londres
Bubble Dogs – 70 Charlotte Street  London W1T 4QG
Sushi Samba – Heron Tower, 110 Bishopsgate, London EC2N 4AY
Hedone – 301-303 Chiswick High Road  Chiswick, London W4 4HH
Kaffeine – 66 Great Titchfield Street  London W1W 7QJ
Monmouth Coffee – 34-36 Maltby Street  Bermondsey, London SE1 3PA

Paris
Kooka Boora – 62 Rue des Martyrs  75009 Paris
Lomi – 3 Rue Marcadet  75018 Paris
Téléscope Café – 5 rue Villedo 75001 Paris
Coutume  – 47 Rue de Babylone  75007 Paris
Le Glass – 7 rue Frochot 75009 Paris
Table Ronde – 58 rue Saintonge 75003 Paris

Crédit photo Table Ronde : Pierre Lucet-Penato